Par les temps qui courent, préféreriez-vous être un employé d'EDF ou un employé de TOTAL ? En d'autres termes : préféreriez-vous travailler, vous engager, donner toute votre intelligence et votre dynamisme pour rétablir le courant dans les derniers foyers frappés par la tempête ou pour enrichir quelques actionnaires en souillant des kilomètres d'une des plus belles côtes du monde ? Préféreriez-vous apporter à la collectivité la lumière ou le mazout ?
Ça peut paraître simpliste mais c'est pourtant bien la différence entre un service public et une entreprise capitaliste. L'employé d'un service public n'enrichit que la collectivité par son travail, personne ne fait de profit en l'exploitant. Le résultat, on l'a vu tout au long de ce mois de janvier, en pleine crise : une mobilisation générale de tous les agents, un formidable élan de solidarité qui a même remis à l'ouvrage les retraités d'EDF. Côté TOTAL : quelques cadres honteux qui semblaient avoir tiré à la courte paille pour aller salir leurs escarpins sur les plages mazoutées. On nous a tellement bourré le crâne pour nous faire croire que les services publics étaient archaïques et inefficaces, que leurs agents étaient des nantis paresseux et incapables, qu'il fallait d'urgence privatiser pour que ça aille mieux ! Où en serions-nous aujourd'hui si des entreprises privées géraient l'électricité en France et qu'elles réagissent aux catastrophes comme TOTAL réagit devant la marée noire ? Si vous voulez en avoir une idée, voyez, en Angleterre, comment la compagnie ferroviaire privée responsable de la catastrophe de Paddington a manifesté son incurie et son irresponsabilité.
Le bon côté des crises, c'est qu'elles nous rappellent à l'essentiel : on peut compter sur un service public, on ne peut pas compter sur une entreprise privée. Cela ne tient pas aux hommes, mais à la différence de deux logiques : l'objectif d'une entreprise capitaliste est seulement de faire des profits, par tous les moyens. Il n'y a que les idéologues de la bourgeoisie pour assurer qu'on peut servir par là l'intérêt commun. Même les privatisations partielles sont dangereuses pour le service public. Elles aboutissent toujours à vendre les secteurs les plus rentables, en laissant à l'État les services coûteux et ingrats. Ainsi, il est prévu d'abandonner au privé l'approvisionnement en électricité des entreprises, par ce qu'il y a là de l'argent à gagner. Soyez en sûr : aucun capitaliste ne voudra s'occuper de la fourniture en électricité des cités populaires, des abonnés modestes, des maisons isolées. L'État est là pour ce genre de tâche. Mais cela déséquilibre le principe actuel de financement des services publics : faire payer les secteurs les moins rentables par ceux qui rapportent de l'argent. Un service public, c'est, comme la SNCF, une entreprise qui gagne de l'argent en faisant rouler des TGV et qui peut, grâce à cela, faire rouler des trains à moitié vides sur des petites lignes rurales. Gaspillage ? Non, solidarité nationale.
Mais il ne faut pas se faire d'illusions : notre service public est très menacé. Les directives européennes, les attaques des libéraux, les convoitises des requins de la finance, tout concourt à la suppression de nos services publics. Il va falloir se battre pour conserver ces acquis, parce qu'ils sont notre bien commun et qu'ils sont la garantie d'une certaine vision de la justice sociale. Mais il ne s'agit pas d'un baroud d'honneur, d'un combat perdu d'avance pour défendre des privilèges d'un autre âge, comme on veut nous le faire croire. Des événements comme les dernières tempêtes nous permettent de remettre les choses à leur juste place. Le service public, n'en déplaise aux libéraux, est un modèle d'efficacité globale, une entreprise dont l'utilité ne se mesure pas aux bénéfices financiers à court terme mais à l'amélioration collective des conditions de vie. La crise et l'extension de la précarité nous le font presque oublier : il est normal d'avoir la garantie de l'emploi, il est normal de ne pas travailler pour la Bourse mais pour l'intérêt commun, il est normal que l'État ait les moyens d'intervenir directement dans les secteurs stratégiques du pays. Il ne s'agit pas seulement d'empêcher les prochaines privatisations : il faut renationaliser largement. Pour ne pas être un jour dans le mazout jusqu'au cou.
Les communistes du 5e