Cadre3


Il paraît que la France est un pays moderne et démocratique. Nous donnons même des leçons de démocratie et de modernité aux Serbes, aux Irakiens, aux Cubains, aux Chinois, en leur disant comment ils doivent voter, en leur expliquant qu'il ne faut pas se fier aux résultats officiels, nécessairement truqués, et en leur promettant monts et merveilles s'ils votent correctement. La France est donc une démocratie... ou presque.

Que dirait-on chez nos censeurs, nos donneurs de leçons et nos politologues d'un pays où un ministre d'Etat détient une cassette compromettante pour le chef de l'Etat, lequel n'est protégé de poursuites judiciaires que par son immunité présidentielle ? Un pays où cette immunité a été votée par un Conseil constitutionnel dont le président, lui-même soupçonné de malversations, n'est maintenu qu'avec le soutien du même chef de l'Etat ? Que dirait-on d'un pays où pas un bâtiment public ne se construit sans que les hommes au pouvoir touchent leur dîme, où les partis politiques n'arrêtent plus de s'auto-innocenter à coup d'amnisties dont on découvre invariablement qu'elles sont insuffisantes pour blanchir tout le monde ? Que penser d'un pays où 70 % des citoyens refusent de prendre part à un scrutin ? On dirait que ce pays est une république bananière, et l'on aurait raison, et nous serions les premiers à donner des leçons de démocratie...

Et il ne s'agit pas seulement d'« affaires » anecdotiques, d'abord parce qu'elles touchent cette fois le plus haut niveau de l'Etat, et ensuite parce qu'elles sont trop nombreuses pour que l'on puisse seulement montrer du doigt quelques boucs émissaires. C'est aussi tout un système politique qui est en cause. C'est d'abord la constitution de la Ve république, que les communistes condamnent depuis 1958, qui donne au président des pouvoirs et des privilèges exorbitants. Le passage du septennat au quinquennat ne va bien sûr rien arranger, et nous voterons seulement tous les cinq ans pour un tandem président-assemblée qui risque fort d'être monocolore et inamovible. Mais c'est aussi l'usage que l'on fait de cette mauvaise constitution qui est anti-démocratique. La règle, depuis vingt ans, c'est une alternance teintée de cohabitation. Une curieuse danse... Un pas à droite, un pas à gauche, mais on suit toujours la même voie : construction de l'Europe des capitaux, pas touche aux profits spéculatifs, restriction des dépenses publiques et gel des salaires. Et l'on s'étonnera que les Français n'aient plus le cœur à voter !



Ne nous étonnons pas en revanche si c'est d'ailleurs que nous viennent des leçons de démocratie. Les Danois viennent de refuser l'Euro. Comment ? Mais on nous avait dit qu'en acceptant Maastricht nous avions automatiquement et définitivement accepté l'Euro ! Et bien non, rien n'est fatal en politique. Mais on nous a refusé un référendum sur cette question ! Oui, mais nous avons eu un référendum pour savoir si le président devait régner cinq ou sept ans. C'est tout de même plus important, non ? Il y a cependant des pays où l'on vote encore pour des questions importantes, où les citoyens ne cèdent pas au bourrage de crâne et aux menaces d'apocalypse économique.

Ne désespérons donc pas de la démocratie en France, qui a encore de beaux printemps devant elle à condition que nous nous mêlions un peu de nos affaires. Et d'abord de démocratie locale. Le Ve arrondissement de Paris est au cœur du maëlstrom politico-médiatique des derniers jours. Nous préférerions certainement une autre célébrité, et que l'on parle plutôt de nos monuments, de nos universités, de nos espaces verts, de nos restaurants ou de notre histoire... Les élections municipales approchent. Profitons-en pour faire le bilan de la vie démocratique dans notre arrondissement. Et ne nous croyons pas quittes de cette réflexion parce que nous aurons rendu à leurs juges le père et la mère Ubu qui tiennent actuellement la Mairie de Paris. Il faudra poser à tout candidat la question de la démocratie locale. Comment va-t-on consulter les Parisiens sur les grands projets qui les concernent ? Dans quel cadre pourront-ils s'exprimer ? Comment compte-t-on garantir la transparence des décisions ? Tout est à inventer dans ce domaine, tant la municipalité actuelle avait accumulé les dénis de démocratie : faux électeurs, pots de vin, trafic d'influence, marchés truqués, opacité des décisions, etc. etc. Les communistes comptent bien utiliser cette campagne électorale pour poser ces questions et surtout pour obtenir des engagements clairs, qu'il sera facile de vérifier. Pour que Paris ne soit plus la capitale d'une république bananière.



Les communistes du Ve arrondissement

Cadre6